COVID-19 : le Brésil face à une hécatombe annoncée

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(Rio de Janeiro) Avec un confinement de moins en moins respecté et un système de santé précaire, le
Brésil semble condamné à devenir le prochain épicentre de la crise planétaire du coronavirus, qui s’y propage à une vitesse galopante.
« La question n’est pas de savoir si le Brésil sera un jour le principal foyer de contamination au monde : c’est déjà le cas », dit à l’AFP Domingos Alves, responsable du Laboratoire de renseignements sur la Santé (LIS) de l’université de Sao Paulo (USP).
Selon les estimations du collectif de chercheurs COVID-19 Brasil, dont il fait partie, le Brésil comptait plus de 1,3 million de cas de coronavirus jeudi et une hécatombe se profile.  
C’est 16 fois plus que les 85 646 cas confirmés ce jour-là par le ministère de la Santé, dans ce pays de 210 millions d’habitants où l’on dépiste très peu.
À titre de comparaison, les États-Unis, qui comptent le plus grand nombre de personnes infectées, viennent de franchir officiellement le cap du million.
Le Brésil a par ailleurs le taux de contamination le plus élevé du monde (2,8), selon l’Imperial College of London.
Dans certains États brésiliens où la situation est la plus critique, comme celui d’Amazonas, le nombre de cas réels pourrait même être 38 fois supérieur au bilan officiel.
En dépit de cette énorme sous-évaluation, le Brésil est déjà le 2e pays (après les États-Unis) qui enregistre le plus de nouveaux cas par jour (6209 vendredi), alors même qu’il est loin de son pic de pandémie.
Le nombre de décès, 6329 selon le dernier bilan national, soit 428 supplémentaires lors des dernières 24 heures, pourrait également être largement en dessous de la réalité.
En raison de la lenteur des résultats des tests, de nombreuses familles enterrent leurs proches sans connaître la cause du décès.
Mais d’après les registres d’état civil, le nombre de décès liés à des syndromes respiratoires aigus sévères a augmenté de près de 1200 % depuis le 16 mars par rapport à la même période de l’année dernière.

Pic incertain

Pour Domingos Alves, la situation est d’autant plus préoccupante que le Brésil est un pays « aux dimensions continentales, avec des populations très vulnérables, comme les habitants des favelas ou les indigènes. Sans compter une faible adhésion aux mesures de confinement ».
Jeudi, le nouveau ministre de la Santé Nelson Teich a admis que le Brésil pourrait dépasser prochainement le seuil de 1000 morts par jour.
Le même jour, le président d’extrême droite Jair Bolsonaro, corona-sceptique notoire, a affirmé que les mesures de confinement décidées contre son gré par les gouverneurs des États avaient été « inutiles ».
Domingos Alves prône au contraire des mesures bien plus strictes : « C’est impossible de prévoir quand le Brésil va atteindre le pic de contaminations, mais une chose est sûre : moins les gens sont confinés, plus la courbe va s’accentuer et plus on aura de morts en raison de la surcharge du système de santé ».

Confinement en baisse

Dans l’État de Sao Paulo, le plus peuplé et le plus touché du pays, le taux de confinement mesuré à partir du signal des téléphones mobiles n’était que de 46 % vendredi, au plus bas depuis le début de la quarantaine décrétée par le gouverneur.
Dans celui de Rio de Janeiro, des files de voitures de touristes attendaient d’entrer dans la station balnéaire de Buzios pour le long week-end férié du 1er mai.
D’après le quotidien Estado de Sao Paulo, plus de 70 % des lits de soins intensifs sont déjà occupés dans six des 27 États du Brésil, avec 96 % dans le Pernambouc, 95 % à Rio de Janeiro et 89 % dans l’Amazonas.  
À Rio, certains hôpitaux sont bien dotés de lits disponibles munis de respirateurs, mais ils sont vides en raison… du manque de médecins.
À Manaus, capitale de l’État d’Amazonas, où les cadavres sont entassés dans des camions frigorifiques près des hôpitaux, le nombre d’enterrements en avril a presque triplé par rapport au même mois de 2019.
Dans le Para, autre État en grande partie recouvert par la forêt amazonienne, les décès liés à la COVID-19 ont triplé en une semaine. Dans la capitale du Para, la maire n’a décidé la fermeture des commerces non essentiels que cette semaine, plus d’un mois et demi après Rio et Sao Paulo.
Et à Blumenau, le nombre de cas a doublé en une semaine, après la réouverture des centres commerciaux. 



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