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En défendant le projet de loi d’extradition vers la Chine, Carrie Lam, qui se présentait jusqu’à présent
comme la garante du principe d’"un pays, deux systèmes" cher à Hong Kong, territoire semi-autonome, est devenue la bête noire des manifestants."La seule responsable de ce mouvement est Carrie Lam. Nous sommes tous ici à cause d’elle et elle seule peut disperser la foule en enterrant le projet de loi". Jimmy Sham Tsz-kit, l’un des leaders de la protestation à Hong Kong, a ainsi désigné, mercredi 12 juin, le personnage clef qui rallie tous les opposants au projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine.
Carrie Lam, 62 ans, cheffe de l'exécutif du territoire semi-autonome de Hong Kong depuis deux ans, n’a pas cillé après la manifestation monstre qui a réuni des centaines de milliers de personnes dimanche : rejetant toute éventualité de retirer le projet de loi ou de retarder son examen, elle a aussi mis en garde l'opposition contre toute "action radicale". Celle qui doit régulièrement se défendre d’être "la marionnette de Pékin" a par ailleurs assuré n’avoir reçu "aucune instruction, ni aucun mandat de Pékin pour mener à bien ce projet de loi".
Ses déclarations n’ont, semble-t-il, ni convaincu, ni dissuadé la rue : mercredi, ils étaient des milliers à défiler de nouveau sur l'île principale. Dans la matinée, des manifestants se sont brièvement emparés de l’avenue Tim Wa… à deux pas des bureaux de Carrie Lam. Devant l’ampleur de la foule, le LegCo, le Parlement local, dominé par les députés pro-Pékin, a annoncé le report à une "date ultérieure" des débats concernant le projet de loi. Mais les manifestants réclament la suspension pure et simple du projet de loi qui faciliterait les extraditions vers la Chine.
De la "nounou" à la "Dame de fer"
Devant cette contestation d’une ampleur inédite depuis le Mouvement desparapluies de 2014, tous les regards sont tournés vers celle qui est surnommée la "Dame de fer" et "la combattante".
Après une longue carrière dans la fonction publique, la doctorante en topologie algébrique, aux cheveux courts et au look austère, s’est fait une place en politique au sein du gouvernement de Leung Chun-ying, où sa loyauté et son efficacité à éliminer le désordre lui ont valu d’être considéré comme "la nounou". Cette fidélité lui vaut de devenir, en 2017, la première femme à diriger le gouvernement de Hong Kong. Mais la popularité n’a jamais été au rendez-vous. Désignée par un collège de grands électeurs acquis à Pékin (auprès desquels elle n'a recueilli que 777 voix sur 1 200), celle qui a prêté serment en présence du président chinois, Xi Jinping, n’a jamais été considérée comme légitime par les défenseurs des droits civiques.
Après cette nomination, Carrie Lam avait fait profil bas en indiquant qu’elle se voyait comme "un pont" entre Hong Kong et Pékin et qu’elle entendait faire respecter le principe du "un pays, deux systèmes" inscrit dans La Déclaration commune sino-britannique de 1984… qui prévoit notamment une justice indépendante pour la "région administrative spéciale" jusqu’en 2047.
Avec son projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine, Carrie Lam montre qu’aux aspirations libérales de Hong Kong, elle privilégie, aux yeux des manifestants, la politique autoritaire de Pékin.
Mercredi après-midi, la "Dame de fer" a joué la carte de l'émotion dans une allocution à la télévision pro-gouvernementale. "Les gens disent que j'ai trahi Hong Kong. Comment aurais-je trahi Hong Kong ? Je suis née et j'ai été élevée ici. J'ai grandi avec les gens de Hong Kong. J'ai fait beaucoup de sacrifices personnels pour cet endroit", a-t-elle déclaré la larme à l'oeil en faisant valoir qu'en tant que mère, elle ne cédait pas quand ses fils lui demandaient quelque chose.
Carrie Lam et au-delà, la Chine, vont-elles lâcher du lest ? Sur France 24, lundi, l’économiste Jean-Paul Tchang estimait : "Le contexte international de bras de fer sino-américain laisse penser que Pékin ne va pas céder. Dans un climat général de guerre froide, Hong Kong est considéré par Pékin comme un pion supplémentaire utilisable par l’Occident au même titre que le Tibet, Taiwan ou le Xinjiang. Selon ce point de vue, il n’y a pas de marche arrière possible".
Par France 24
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